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Repenser client pour réussir !

Interview Alexandre KSON pour le blog de Bertrand Jouvenot à l’occasion du livre « Marketeurs, mobilisez-vous ! (sans déraper) » – Editions KAWA – Avril 2019 1. Pourquoi avoir écrit ce livre… maintenant ? Parce que pour les chefs d’entreprise, les entrepreneurs et les marketeurs, il y a urgence. Oui, urgence à se mobiliser. Il […]
03/03/2023
Par Alexandre Kson
Repenser client pour réussir !

Interview Alexandre KSON pour le blog de Bertrand Jouvenot à l’occasion du livre « Marketeurs, mobilisez-vous ! (sans déraper) » – Editions KAWA – Avril 2019

1. Pourquoi avoir écrit ce livre… maintenant ?

Parce que pour les chefs d’entreprise, les entrepreneurs et les marketeurs, il y a urgence. Oui, urgence à se mobiliser. Il me serait plus facile de parler l’hébreu ou le chinois que d’imaginer le monde d’aujourd’hui sans ordinateurs, sans WIFI, sans applis. Internet a révolutionné nos vies. Réaliser des achats comme il y a 20 ans relèverait pour un consommateur actuel de l’expérience la plus harassante qui soit. Le monde change, et le changement du monde s’accélère.

Comme toutes les sociétés nouvelles, la nôtre est violente par essence parce que sa technologie est naissante et que nous n’en maîtrisons pas encore totalement les rouages. On entend que 65 % des élèves de maternelle d’aujourd’hui exerceront à l’âge adulte des professions qui n’existent pas encore. On voit des métiers disparaître à la pelle, laissant sur le côté de la route de nombreux travailleurs. On observe depuis près de dix ans la chute de nombreux distributeurs historiques que l’on croyait jusqu’alors indéboulonnables. C’est la fin de l’arrogance des marques.

Pour sûr, l’installation de ce monde neuf n’est pas sans victimes. Le nouveau paradigme remplace peu à peu les anciens schémas du passé. Véritable séisme économique et sociétal, les enseignes mal préparées sont dans la tourmente. Car cette nouvelle technologie donne aux consommateurs un pouvoir sans limite, celui d’exprimer pleinement leurs attentes et leurs envies. Les marques sont mortelles face à ces clients assassins. Alors il y a urgence à la transformation des business model. Dans mon livre Marketeurs, mobilisez-vous !, je propose ce que j’appelle une nouvelle charte de mobilisation des différents acteurs de l’entreprise. Dans ce nouveau contexte, que faire ? Quelle attitude adopter ? Comment réussir sa mutation de modèle ?

À nouveau consommateur, nouveau marketeur ! Et à nouveau marketeur, nouvelles réussites ! J’ai voulu dans ce livre passer en revue les fondamentaux du marketing d’aujourd’hui dans ce monde neuf qui se dévoile à nos yeux. Autour des enjeux actuels de la compréhension client et du marketing empathique, de la co-construction communautaire et de la compensation des frustrations, il m’a semblé urgent de proposer une démarche et des solutions pragmatiques et efficaces.

2. Si vous deviez donner un seul conseil à un lecteur de cet article, quel serait-il ?

Mon livre Marketeurs, mobilisez-vous ! se termine par les 50 clefs de succès pour redevenir acteur d’une transformation économique réussie. Alors il faudrait pour vous répondre que je choisisse la plus importante, ce qui n’est pas facile. Peut-être celle-ci : « Considérer le client comme une personne et non pas comme un chiffre dans un tableau de bord. »

Il est impératif de mieux connaître ses clients. Plus que jamais, les nouveaux entrepreneurs doivent s’appuyer sur des certitudes et refuser les approximations. Mieux comprendre en profondeur et dans le détail les nouvelles envies du marché. Mieux cerner les points de frustration avant que d’autres acteurs y répondent en usant des nouvelles technologies. L’action marketing doit s’appuyer sur le développement d’une plus grande capacité d’empathie. Elle doit travailler avec sincérité à la proposition de réponses aux attentes non servies. Le digital doit être utilisé en ce qu’il permet d’ouvrir le champ du possible. L’innovation doit être au service du client, de l’apport de valeur ajoutée, de l’enrichissement de l’expérience vécue… En somme, comprendre, co-construire et compenser dans un monde où le consommateur a pris le pouvoir.

3. Une page de votre livre, ou un passage, qui vous représente le mieux ?

Ecrire ce livre a été une aventure passionnante. J’ai pris beaucoup de plaisir à y réfléchir, à le concevoir puis à le rédiger. Mais je me suis aussi souvent amusé et je dois avouer qu’il y a parfois un peu d’ironie et beaucoup de second degré dans certains passages du texte. Comme dans le paragraphe suivant qui clôt un chapitre sur la prise de pouvoir des consommateurs.

« Alors que nous reste-t-il à désirer ? Se réveillent les rêves humains impossibles. Les vieux démons. Se révèle à nous, nos yeux ébahis, l’ultime et dernier étage de la pyramide de nos besoins. Un étage auquel nous avions renoncé pour un temps : l’étage divin. Le développement de la science au cours du XIXème siècle avait mis à mal le sentiment religieux. Nietzsche écrit « Dieu est mort ». Voilà que c’est la technologie digitale qui lui redonne vie. Mais ce dieu qui revient à nous est d’une nouvelle nature : ce nouveau dieu auquel nous croyons, c’est nous-mêmes. Nous nous comportons avec nos outils digitaux à la manière des dieux de l’Olympe. Nous en souhaitons les attributs. Éternité. Une vie artificielle sans fin. Omniscience. Une connaissance sans limites. Europeana, le projet fou de numérisation de 58 millions d’œuvres d’art. Ubiquité. Skype et les nouveaux outils de communication nous permettent d’être partout en même temps. Nous parlons toutes les langues via des applis pour téléphone. Le monde devient une tour de Babel, une auberge espagnole. La notion de frontière ne peut plus avoir de sens dans ces conditions. Les contraintes physiques disparaissent. Omnipotence. Toute-puissance. Nouvelle chapelle Sixtine, le seul doigt de Dieu que nous reconnaissons est celui du digital. Piloter le monde depuis nos smartphones, voilà ce que nous désirons. Fiat lux lorsque nous composons notre code d’accès sur notre smartphone, cette extension divine de nous-mêmes. Ambroisie. Orgueil et vanité. Oui, Internet a donné le pouvoir aux consommateurs… un pouvoir de droit divin. »

4. Les tendances qui émergent à peine et auxquelles vous croyez le plus ?

Permettez-moi de vous répondre non pas en zoomant sur un point précis sociétal ou technologique mais au contraire en élargissant le point de vue et en prenant un peu de hauteur. Nous ne sommes qu’au tout début du changement du monde ; et notre époque doit apparaitre pour ce qu’elle est, c’est-à-dire un point d’étape qui sera vite dépassé puis oublié. De la broutille historique au regard de tout ce qui nous attend encore et dont on ne peut à date presque rien imaginer. Parce que tout reste à construire. Parce que ce que nous ferons de cette nouvelle technologie reste entre nos mains. Ce sera notre décision collective. À nous de jouer, et si possible « sans déraper ». En cela, j’y crois dur comme fer : la technologie ne nous impose rien, elle nous révèle assurément, mais ne nous domine jamais. Et c’est justement ce qui est passionnant : il nous reste tout à construire.

5. En un mot, quels sont les prochains sujets qui vous passionneront ?

Le marketing est depuis toujours le reflet de nos sociétés. Dans la dernière partie du livre, en guise de conclusion et d’ouverture, j’essaye d’analyser et de comprendre ce que toute cette transformation du consommateur et du marketing nous dit aussi de l’état de notre société. C’est un vaste sujet, passionnant, que je vais continuer à explorer.

Associée à une envie de consommation sans précédent – je consomme donc je suis – et aux frustrations plus fortes encore nées de la transparence sur les réseaux sociaux – les Narcisses du monde entier s’admirent dans les eaux troubles de Snapchat –, cette transformation digitale a tout pour être explosive. Il faut alors voir dans le repli sur soi et dans le communautarisme solitaire les conséquences tristes d’une société impatiente qui se cherche encore. La violence de l’argent, selon l’expression chère à Michel Aglietta, est devenue celle du bitcoin, mais n’a jamais été aussi vive.

Les conséquences humaines de la nouvelle donne économique peuvent être dramatiques. Du « c’était mieux avant » à la montée de l’extrémisme, l’Histoire nous montre qu’il n’y a souvent qu’un pas. Partout dans le monde, aux États-Unis, au Brésil, en Europe, en Italie, mais aussi hélas en France, la résistible ascension des nouveaux Arturo Ui est fulgurante. Et qu’ils soient de gauche ou de droite, l’Histoire a montré qu’ils n’apportent que peur, haine et souffrances. Il n’y a rien à attendre de bon des vieux populismes et des nouvelles radicalités.

Ceux qui dirigent les entreprises et qui pilotent l’économie ont alors une responsabilité sociale réelle. Cette mobilisation marketing que je propose dans mon livre se veut donc aussi, humblement, mais sereinement et avec conviction, une mobilisation citoyenne. Et si nous construisions ensemble notre nouveau monde apaisé ?

Le monde de demain n’est pas encore écrit, mais il y a un point qui me semble certain : nous sommes collectivement libres de le façonner à notre guise. Il n’y a pas de fatalité. Nous pouvons construire une société bienveillante pour chacun. Et le numérique peut nous apporter infiniment plus que ce que nous en faisons actuellement. Nombreux sont ceux pour qui la transformation digitale rime avec doutes, craintes et peurs. Il vrai qu’il ne faut pas en sous-estimer les dangers. Mais pour autant, je veux pour ma part y voir un vaste champ d’espérance dont il est passionnant d’être l’un des modestes artisans.

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